La décision laisse entrevoir une issue à ce conflit entre Israël et le Hamas. Onze jours après le début des combats, qui ont déjà fait plus de 240 morts, dont une majorité de Palestiniens, Israël et le mouvement islamiste ont approuvé un cessez-le-feu, jeudi 20 mai. Cette trêve dans la bande de Gaza, territoire palestinien de deux millions d’habitants sous blocus israélien, est officiellement entrée en vigueur vendredi à 2 heures (1 heure, heure de Paris).
Dès l’entrée en vigueur de la trêve, des milliers de Palestiniens ont célébré l’événement dans les rues du centre de Gaza. « Nous avons gagné », a dit sur place à l’Agence France-Presse (AFP) un combattant de la brigade Ezzedine Al-Qassam, branche armée du Hamas. Des manifestations de joie se sont aussi multipliées dans des villes de la Cisjordanie occupée, tandis que l’armée israélienne ne faisait mention d’aucune nouvelle alerte à la roquette.
« Ceci est l’euphorie de la victoire », a lancé Khalil Al-Hayya, numéro deux du bureau politique du Hamas dans la bande de Gaza, lors d’un discours devant des manifestants en liesse, promettant, en outre, de « reconstruire » les maisons détruites par les frappes israéliennes.
« Le cabinet [de sécurité d’Israël] a accepté à l’unanimité la recommandation de l’ensemble des responsables sécuritaires (…) d’accepter l’initiative égyptienne de cessez-le-feu bilatéral sans condition », ont rapporté dans un communiqué les autorités israéliennes. Dans la foulée, le Hamas et le Jihad islamique – autre groupe armé de la bande de Gaza – ont confirmé l’entrée en vigueur de cette trêve.
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L’Egypte sera chargée de veiller au respect du cessez-le-feu
L’Egypte va envoyer deux délégations à Tel-Aviv et dans les Territoires palestiniens pour veiller au respect du cessez-le-feu approuvé jeudi soir par Israël et les groupes armés palestiniens, ont indiqué des sources diplomatiques égyptiennes.
« Deux délégations égyptiennes seront envoyées à Tel-Aviv et dans les Territoires palestiniens pour surveiller la mise en œuvre [du cessez-le-feu] et le processus pour maintenir des conditions stables de manière permanente », ont indiqué ces sources à l’Agence France-Presse (AFP), soulignant que cette trêve « simultanée et mutuelle » avait été « négociée par l’Egypte ».
Les Etats-Unis et le Royaume-Uni saluent cet accord
Cette annonce survient après que le président américain, Joe Biden, a exhorté, mercredi, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, d’œuvrer à une désescalade, sur fond de tentatives de médiation de la part de l’Egypte, du Qatar et de l’Organisation des Nations unies (ONU).
Joe Biden a exprimé, jeudi, sa « sincère reconnaissance » à l’Egypte pour son rôle dans les négociations. « Je suis convaincu que les Palestiniens et les Israéliens méritent tout autant de vivre en sécurité et de jouir d’un même niveau de liberté, de prospérité et de démocratie, a déclaré le président américain depuis la Maison Blanche. Mon administration poursuivra notre diplomatie discrète et infatigable pour aller vers cet objectif. Je suis convaincu que nous avons une véritable occasion d’avancer, et je m’engage à travailler en cette direction. » Le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, se rendra au Moyen-Orient « au cours des prochains jours », a annoncé jeudi le département d’Etat.
Le Royaume-Uni a salué jeudi l’accord de cessez-le-feu à Gaza approuvé par Israël et le Hamas. « Toutes les parties doivent travailler pour rendre le cessez-le-feu durable et mettre fin à l’inacceptable cycle de violence et de pertes de vies humaines », a tweeté le ministre britannique des affaires étrangères, Dominic Raab, ajoutant que Londres soutient « les efforts pour parvenir à la paix ».
Vendredi, c’est l’Allemagne qui a salué ce cessez-le-feu. Berlin veut désormais « s’attaquer aux causes profondes » du conflit pour « trouver une solution » au Proche-Orient, a déclaré le chef de la diplomatie, Heiko Maas, tout juste rentré d’une visite en Israël et dans les territoires palestiniens. M. Maas a par ailleurs adressé un « grand merci à l’Egypte pour sa médiation ».
Cinq personnes tuées jeudi
Quelques heures avant l’annonce de ce cessez-le-feu, les frappes israéliennes s’étaient intensifiées sur l’enclave palestinienne, faisant s’élever des nuages de fumée et des débris dans le ciel, tandis que des ambulances filaient à travers l’enclave, selon des journalistes de l’AFP.
En fin d’après-midi, un nouveau tir de barrage de roquettes a visé le sud d’Israël, poussant des habitants à se réfugier dans des abris antibombes. Cinq personnes ont été tuées jeudi dans la bande de Gaza.
Ce cycle de violences a été déclenché à la suite du tir par le Hamas de salves de roquettes vers l’Etat hébreu le 10 mai, en signe de solidarité avec les centaines de Palestiniens blessés lors de heurts survenus avec la police israélienne sur l’esplanade des Mosquées, troisième lieu saint de Jérusalem, dans le secteur palestinien de Jérusalem occupé par Israël depuis plus de cinquante ans.
Au moins 232 Palestiniens sont morts, dont une soixantaine d’enfants, dans les bombardements israéliens sur Gaza. Du côté israélien, 12 personnes ont été tuées, les mouvements armés palestiniens de Gaza ayant tiré plus de 4 000 roquettes vers le territoire israélien.
Intenses tractations
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, avait, de son côté, estimé que la poursuite des tirs israéliens et palestiniens était « inacceptable », ajoutant que « les affrontements devaient cesser immédiatement ».
Après l’appel du président américain, Joe Biden, pour une « désescalade » immédiate et le refus de Washington de soutenir une résolution de la France à l’ONU, l’Allemagne était entrée en scène jeudi. Le chef de la diplomatie allemande, Heiko Maas, s’est rendu en Israël, où il a visité jeudi des sites touchés. Il a soutenu que les frappes israéliennes sur Gaza relevaient du « droit à l’autodéfense », tout en appelant à une cessation rapide des hostilités.
La chancelière allemande, Angela Merkel, avait plaidé pour un « cessez-le-feu rapide » lors d’un entretien téléphonique avec le président palestinien, Mahmoud Abbas.
Réduire les capacités du Hamas
Mais l’Autorité palestinienne, que Mahmoud Abbas dirige depuis la Cisjordanie, a peu d’influence dans la bande de Gaza, microterritoire sous blocus israélien et sous contrôle des islamistes du Hamas depuis 2007. Comme Israël, les Etats-Unis et l’Union européenne considèrent le Hamas comme une organisation terroriste et ils doivent emprunter d’autres canaux pour discuter d’une possible trêve. D’où le rôle notamment de l’Egypte, voisine de Gaza.
Pendant dix jours, l’armée israélienne a pilonné la bande de Gaza. Israël a « profité » de la situation, selon un responsable militaire israélien, pour « réduire les capacités » militaires du Hamas. Lors des précédents conflits entre le Hamas et Israël, les prémices de désescalade étaient notamment passées par l’instauration de « trêves humanitaires », afin de permettre la circulation de l’aide internationale et les réparations urgentes sur les infrastructures cruciales endommagées.
Un responsable militaire israélien avait affirmé mercredi que l’armée était prête à encore « plusieurs jours » de conflit. « Ce que nous essayons de faire est précisément ceci : diminuer leurs capacités, leurs moyens terroristes et diminuer leur détermination », avait renchéri le premier ministre, Benyamin Nétanyahou.
Photo : @baraa_nedal pour Eye on Palestine, scènes de liesse à la mosquée Al-Aqsa tôt ce matin